dimanche 27 avril 2008

Lambert Christian - mercredi 23 avril 2008

chine, communisme
Nombreux sont les « braves gens », en France et ailleurs, jeunes et moins jeunes, qui, depuis un mois, prennent feu et flamme en faveur du Tibet, de ses habitants, de sa religion et de sa civilisation. Fort bien, mais ils arrivent un peu tard et paraissent ne pas savoir qu’au Tibet, le mal est fait depuis longtemps.

Dès sa victoire en, 1949, Mao Tsé Toung a fait envahir le Toit du monde par ses armées. La sinisation et une répression génocidaire ont aussitôt commencé. Le Dalaï-lama dut s’enfuir en 1959 et, à partir de 1966, les gardes rouges de la Révolution culturelle causèrent d’immenses dégâts, pillant, brûlant des temples millénaires et massacrant les Tibétains à qui mieux mieux. Au lendemain de la Révolution culturelle, seuls 12 des 6 259 lieux de culte du bouddhisme tibétain avaient été épargnés.

Mais, en ce temps-là, les « braves gens » qui, aujourd’hui protestent et manifestent, étaient alors, pour beaucoup, les admirateurs éperdus de la révolution communiste chinoise et de son grand Timonier, le camarade Mao. Ils n’étaient pas les seuls. Partout dans le monde et plus particulièrement en France, on recherchait l’honneur d’être admis en Chine, d’être reçu par ce « génie du genre humain » qu’était Mao Tsé Toung devant lequel on allait se prosterner et pas seulement des marxistes, mais des hommes politiques dits de droite, aussi ignorants des réalités chinoises que dépourvus de jugement.
« Mao Tsé Toung est un génie de l’humanité » proclamait dans les années 1970 un Président de la République française. L’ennui est que ce « génie de l’humanité » a provoqué la mort de dizaines de millions de ses compatriotes par des décisions d’une remarquable et criminelle idiotie, comme le Grand bond en avant, et instauré dans son pays une dictature implacable comme l’avait fait en URSS le « camarade Staline », son modèle avant qu’ils ne se brouillent et en viennent aux mains.

Le Tibet aujourd’hui n’existe plus. Les communistes chinois ont fait disparaître quelque 800 000 Tibétains sur 2,8 millions qui n’ont pas été seulement fusillés, mais battus à mort, crucifiés, brûlés vifs, noyés, mutilés, affamés, étranglés, pendus, ébouillantés, enterrés vivants, écartelés ou décapités (Cf. Tibet : génocide sur le « Toit du monde », in Stéphane Courtois : « Le Livre noir du communisme. Crimes, terreur, répression »). Lhassa est sinisée, défigurée par les enseignes chinoises, les gargotes, les bars et les bordels que fréquentent les Chinois qui arrivent de plus en plus nombreux, maintenant par le train Pékin-Lhassa, ce qui coûte moins cher que d’émigrer Porte d’Italie à Paris.

La jeunesse tibétaine elle-même, de plus en plus intoxiquées par la télévision, se sinise et peu à peu abandonne sa propre civilisation.
Si l’on veut trouver ce qui reste du Tibet, c’est au Bhoutan qu’il faut aller, dans certains quartiers de Katmandou et au Ladakh, « le petit Tibet » et, bien sûr, à Dharamsala en Inde, où réside le Dalaï-lama

Ceci étant, que l’on sache que les protestations, occidentales et autres, en faveur du Tibet n’auront aucun effet. Les Jeux Olympiques auront lieu. Les milliards de dollars investis dans cette grande foire au sport et à la télévision ne seront pas perdus. Il faut savoir aussi qu’obsédé de tout temps par la crainte de forces centrifuges, le pouvoir à Pékin ne cédera rien, qui se moque totalement des états d’âme de tel ou tel chef d’État occidental s’interrogeant sur sa présence à la cérémonie inaugurale des Jeux – ce ou ces présidents qui s’en vont à Pékin en grande pompe et en famille pour supplier nos « amis communistes chinois » de signer quelques contrats de nature à diminuer le nombre de nos chômeurs.

La comédie actuelle avec les Chinois, on l’a déjà jouée avec les Soviétiques dont certains imprudemment doutaient, alors que notre intelligentsia, dans sa majorité, professait la plus grande considération pour le régime de Moscou. Souvenons-nous. On dénonçait le massacre de l’élite de l’armée polonaise à Katyn par la barbarie nazie. Mais, du jour où, Gorbatchev étant président de l’URSS, il fut reconnu en 1990 que ces milliers d’officiers polonais – 21 857 – avaient été exécutés par le NKVD, le KGB de l’époque, plus un mot n’en fut dit. Je crois me souvenir aussi que, lors des Jeux Olympiques à Moscou qui venait d’envahir l’Afghanistan, il y eut en Occident quelques froncements de sourcils. Et alors ?

Un mot encore pour terminer. Les Chinois prennent des mesures de rétorsion contre les intérêts français en Chine, se montrant en particulier très favorable à l’indépendance de la Corse. Les Français n’étant pas les seuls dans le monde à manifester en faveur du Tibet, j’ai demandé à qui de droit pourquoi les Chinois s’en prenaient surtout aux intérêts français. Voici la réponse qui m’a été donnée : « La direction chinoise est pragmatique. Sachant que la France est un pays faible, à la gouvernance incertaine, les Chinois s’en sont pris au faible. C’est plus facile que de s’en prendre aux forts. »
Alors que faire ? Envoyer à Pékin une délégation de haut niveau pour demander pardon à l’empereur ! Bref, tout cela, c’est ce qu’on appelle une politique de Gribouille…

Christian Lambert
Ancien Ambassadeur

Source : Les 4 vérités, fourni par Shen Qi.

1 commentaire:

中鈞 a dit…

L'opinion de cette personne qui se dise "ambassadeur", est représentative de l'aile droite libérale, fondée sur la démagogie et provocation. Il faut l'étudier, mais pas se casser la tête, la France est un grand pays parce qu'il y a une palette très complexe de points de vue, fondés ou infondés. Au fond, chaque jugement que nous portons sur les gens et les choses, n'est-il pas un préjugé ?